… Et des difficultés à surmonter (Pedro 3/5)
- Les Cueilleurs d'Histoires
- 2 févr. 2021
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 2 mars 2021
Lui n'en a pas réellement rencontré, mais il s'interroge sur les épreuves qui pourtant peuvent exister et qu'il importe de surmonter...

Je suis l’aîné des enfants de la famille, j’ai deux frères. Dans la vie de quartier, tu ne peux pas toujours te référer aux parents, tu ne peux pas te référer aux petits frères ou petites sœurs, c’est à toi de gérer ta barque.
Moi, j’avais des facilités à l’école, alors je n’avais pas spécialement besoin de mes parents. Mais, comme tout gamin dont les parents sont d’origine étrangère ou sont étrangers, et bien, l’aide pour les devoirs, ce n’était pas forcément facile. J’avais la chance d’avoir des facilités, alors je me débrouillais tout seul. Ce que j’ai vite ressenti, c’est que tu as de la chance quand tu as des facilités.
Je me suis souvent demandé, face à quelques petites difficultés que je pouvais rencontrer, ce que ça pouvait être pour ceux qui se retrouvaient seuls, le soir, devant un énième exercice qu’ils n’arrivaient pas à faire et en ayant personne à qui demander.
Se retrouver avec une difficulté liée à l’école, qui parfois peut être humiliante, c’est difficile. Et ce qu’on pense parfois être le meilleur moyen de se débarrasser de ce poids supplémentaire dans la vie, au quotidien, c’est de renoncer. C’est comme ça que certains jeunes décrochent.
J’ai envie de dire que personne ne peut savoir mieux qu’eux, ce que c’est que d’être dans cette situation. Mais, ce qu’ils doivent garder en tête, c’est que l’effort qu’ils peuvent faire à l’école, ça peut être un investissement... le plus rentable de leur vie.
S’ils investissent dans cet effort pour rester accrochés à l’école, c’est quelque chose dont ils pourront récolter les fruits quelques années après.
Il ne faut pas avoir de complexe à se signaler comme étant en difficulté. Le rapport à l’enseignant n’est pas toujours facile, mais la grande majorité d’entre eux est bienveillante. Si l’élève est en demande, explique ses difficultés, il sera accompagné. Et pour moi, entre le CM1 et la 5ème, ce sont les années cruciales, et c’est important que l’élève, les parents, les grands frères, les grandes sœurs, aient une attention particulière sur cette période parce que c’est là qu’on prend les bonnes habitudes, qu’on se rassure sur le socle de connaissances que l’on possède et qu’on peut ensuite avoir une scolarité sereine.
Est-ce que j’ai eu des moments de doute ? Non et oui. Non parce qu’il se trouve que les études ça a été facile pour moi, mais oui sur la question : pour quoi faire ?
"Et ça, c’est un vrai sujet : on fait des études pour quoi faire?"
Quand votre grand frère est avocat, votre mère infirmière, votre père ingénieur, et bien vous voyez à peu près ce que vous pourriez faire en faisant des études longues ou assez longues. Vous avez autour de vous des gens qui ont fait des études et qui vous expliquent ce que vous pourriez faire.

"En fait, jusqu’à très tard, je ne me suis pas vraiment posé la question de mon métier futur. J’ai l’impression que je n’avais pas d’envie particulière".
Un peu comme Voltaire, j’avais surtout décidé d’être heureux parce que c’était bon pour la santé. Les études et le travail ne sont pas tout. C’est important, c’est ce qui va concourir à une bonne vie, mais souvent je dis aux étudiants que ce qui compte c’est qu’ils vivent bien le chemin qu’ils ont emprunté.
Il faut avoir un but, mais on va déjà commencer par apprécier le chemin sur lequel on est. Donc, jusqu’à 14,15 ans, je ne me posais pas du tout ce genre de questions. Ce que je voulais c’était être bien, vivre bien, être bien dans mon cocon familial.
J’ai bien vécu ces années-là… un peu moins la fin de collège. Je commençais à m’ennuyer. Le passage au lycée, tous les matins, tu prends le bus pour aller en centre-ville, tu as une petite vie de centre-ville, tu vois des gens différents, ça a été une vraie ouverture, une vraie révélation. Et là, j’ai commencé à me projeter un peu plus. Mon truc à l’époque, c’était de devenir architecte. J’aimais les maths, la géométrie, la symétrie, le dessin, même si je ne suis pas bon. On nous disait que si tu faisais un bac scientifique, c’est ce qui t’ouvrait le plus de portes. Je suis allé comme ça jusqu’au bac.
Ça semble s’être fait un peu tout seul, sans véritable stratégie, je pense que c’était notamment lié au fait que je vivais dans un environnement où ce n’est pas le sujet de conversation ce qu’on avait envie de faire plus tard. Tu n’en parles pas spécialement avec tes copains. Eux, en rigolant, t'appellent « la grosse tête ».
Je vivais les choses au quotidien sans trop me prendre la tête, mais j’avais le profil de quelqu’un qui aurait dû faire une classe préparatoire, les concours des grandes écoles et en fait, et en fait… non.
Et donc je suis arrivé au bac et après le bac, qu’est-ce que je vais faire… je n’en sais rien !

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