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Charles Cottet - village arabe et mosque

Charles Cottet, Village arabe et mosquée. Huile sur toile, avec cadre 57 x 61,8 cm. Collection Olivier Senn. Donation Hélène Senn-Foulds, 2004. Le Havre, musée d’art moderne André Malraux © 2005 MuMa Le Havre / Florian Kleinefenn

PAIX

"Souvenirs et immuabilité

 

J’ai choisi sans beaucoup d’hésitation.

Ça m’a l’air d’être dans un village en Afrique du Nord, vers chez moi..., enfin vers mon pays d’origine, en Tunisie, ou en Egypte… Ça m’a l’air d’être une mosquée en haut : la tenue des gens, le décor, le paysage, le temps aussi, il fait chaud en Afrique.

 

Je suis déjà allé en Tunisie, un petit village où les maisons sont faites en pierres pareil que là. Ça s’appelle Matmatah. Ça ressemblait à ça un peu mais pas tout à fait, il y avait du sable, les maisons étaient plus éparpillées, plus isolées.

Ça fait longtemps que j’y suis allé, j’ai un peu ma famille là-bas.

J’y allais en vacances, mais en vacances à la cité, ça veut dire que c’est les vacances, mais sans plus..., sans hôtel. Ce n’est pas le grand luxe !

J’aime bien les gens, même quand ils ont rien, ils donnent.

Je me souviens des paysages, une allée avec plein de maisons, tout le monde se connaissait.

 

Ce tableau, il date de longtemps, vraiment longtemps… 1950 peut-être ? Même maintenant, si ça se trouve, si on y va, c’est encore comme ça, ça a peut-être un peu évolué, mais on retrouvera les mêmes maisons en pierres, les tenues, les trucs sur la tête - je ne sais pas si ce sont des bonnets - et la djellaba.

Je trouve ça bien, c’est important de ne pas oublier d’où on vient.

Là-bas, je pourrais m’habiller comme ça, mais pas en France !

 

Derka à Matmatah

 

Si j’étais une des personnes de la peinture… j’irais bien manger... les saveurs orientales… c’est bon !

J’irais à la plage, avec ma famille. Si on peut ramener les amis aussi, j’irais avec eux. Après… ça c’est personnel, j’irais prier, comme tous les jours.

Je pense que la mer est là-bas, derrière la mosquée, à gauche, ça m’a l’air qu’il y a une petite courbe.

 

Si tout se passe bien en France, je reste en France, et j’y vais juste en vacances, mais dans des cas extrêmes, par exemple si je suis en cavale, alors je pourrais aller là-bas !

Ce qui me manquerait c’est les amis, le quartier, les délires de jeunes, faire de la moto, être avec mes potes, ma famille, ma mère, ça c’est le plus important.

Avec mes amis, ce n’est pas comme avec les autres. Je suis bien, j’oublie les soucis de la vie. Avec la famille, c’est encore mieux… la famille, c’est la base ! Même les amis, je les considère comme la famille… certains…

 

Dans la peinture, les gens font leur vie, ils accompagnent leurs enfants, ils vont manger peut-être. Ici, ils ne doivent pas avoir beaucoup de soucis, tout le monde se connaît, habite à côté, tout le monde parle ensemble. Ils doivent bien s’entendre.

 

Mais je n’aurais pas envie d’y vivre, c’est bien pour les autres, les vieux qui veulent se reposer, pour finir une vie. C’est vivant, mais sans trop… je ne sais pas s’il y a des gens de mon âge qui font un peu n’importe quoi… des petites bêtises, des trucs de gamins. Ça m’a l’air un peu vide, un peu triste…

Ils n’ont pas mis assez de personnages. Si j’avais peint, j’aurais mis la plage en mieux, des petits enfants qui jouent, un petit commerce et c’est tout.

 

 

Un inconnu riche

 

Légèrement à droite, c’est plus sombre, marron, moi, je vois une porte, une porte d’entrée, peut-être que c’est chez quelqu’un, tout est marron et la porte est rouge et la poignée, jaune bizarre.

Il a une grande porte lui ! Il vit bien dans la Cité !

C’est quelqu’un qui a de l’argent, qui vient d’un pays étranger ou un ministre… peut être un chanteur, un footballeur aussi. Ou… peut-être une personne qui a travaillé.

Dehors, j’étais dans la vente en alternance. J’ai fait plein d’autres trucs, je n’ai pas aimé. La vente, il n’ y a rien de sorcier. Mais, je ne sais pas trop ce que j’ai envie de faire.

Je pense que c’est l’automne, quand les feuilles tombent. Le ciel est un peu gris. L’air est encore chaud, mais rien à voir avec la canicule. C’était un four dans les cellules pendant la canicule ! On transpire, c’est une torture… C’est un temps à être dehors.

En plus, ils m’avaient mis au quartier disciplinaire.

On n’ a pas la télé, on n'a que la radio, elle ne marche pas terrible, on n’a pas nos cantines, on mange la gamelle. La promenade est toute petite, elle fait juste la taille d’une pièce; en haut, c’est couvert, il y a un toit, c’est une sorte de grille, on voit juste un peu le ciel… c’est pas une vie ! Déjà, être ici, c’est dur, alors le quartier disciplinaire...

 

 

« Lever », ou la liberté

 

La moto, rouler… c’est une libération… c’est indescriptible. Quand on « lève » devant les gens, on se la raconte un peu, la sensation d’être en l’air, c’est une libération, c’est comme un parc d’attractions, il faut tenir en équilibre.

J’ai commencé en vélo avec le frein à la main, après, j’ai appris en scooter et puis en moto ; c’est autre chose, le frein est au pied, en bas à droite, là, c’est plus compliqué… je suis tombé plusieurs fois, mais rien de grave.

 

Rouler les deux roues au sol, c’est bien aussi, mais une roue, c’est un plaisir indescriptible. C’est manier l’engin, c’est avoir du flow, avoir la dégaine. Quand j’étais plus petit, je voyais des grands « lever »… c’est mieux que le foot ça !

 

Ce serait cool de faire de la moto, là-bas dans le désert, au bord de la plage. Passer dans cette rue, j’aimerais bien… les gens diraient « il est chaud lui !! »

Les gens quand ils me voient, il y en a qui disent « Inch’Allah il tombe » ! Il y a beaucoup d’envieux, beaucoup aimeraient « lever ». Avant je me disais « Si tu arrives à lever, tu as réussi ta vie ». Quand j’ai grandi et mûri, je me suis dit que ce n’était pas comme ça.

 

La prison : logique du système

 

J’ai pensé qu’il y avait une prison, mais non. Partout il y a une prison… c’est comme les magasins. C’est logique, mais elle ne doit pas être ici ou alors c’est une prison pour les gens, loin de leur famille, comme Alcatraz pour montrer la difficulté, la dureté de la prison. Mais normalement, une prison, ça doit être dans une grande ville. C’est logique, c’est comme si je disais, c’est logique d’avoir une boulangerie.

Une prison, c’est la base d’un pays, d’une ville. C’est important d’avoir une prison. Moi, je suis contre… mais les violeurs, tout ça, il vaut mieux qu’ils restent là-bas. Il y en a partout, dans chaque zone. Il n’y a aucun pays où il n’y a pas de prison.

Dehors, en regardant cette fenêtre, je n’aurais pas du tout pensé à une prison !

En prison, on est beaucoup pensif. On tue le temps, c’est dur. On pense à dehors, à pourquoi on est là. Les gens qui ont pris une grosse peine, pour meurtre par exemple. Je me dis que c’est chaud. C’est pas une fatalité. Moi, disons que si on touche à ma famille, je peux vriller, comme tout le monde. Les gens qui prennent 20 ans, c’est désolant.

 

J’ai pensé à la prison en voyant les barreaux, mais non, c’est une fenêtre, une grange. Si c’était une prison, on pourrait s’échapper du toit, ce n’est pas haut, les habitants ne passent pas comme ça devant une prison. Nous ici, il n’ y a personne. Parce qu’il peut y avoir les « mis en cause », les complices, la famille, ils pourraient passer des choses. C’est vraiment bête si le gouvernement fait ça !

 

Paix et Amour

 

Il y a une très grand mosquée, ça, c’est bien, c’est important, très important. Pour nous les Musulmans, c’est important de prier, c’est même obligatoire.

Ils l’ont mise en valeur, ils l’ont faite grande, qu’on la voit bien, et puis elle est très jolie, la forme, la couleur, la hauteur… Elle est au-dessus de tout. Elle domine.

La mosquée, elle amène la paix, l’amour, la religion quoi. Après, elle est beaucoup salie à cause des extrémistes, les djihadistes… eux ils méritent la prison… ils font partie des violeurs. Tu ne tues pas quelqu’un comme ça ! C’est grave."

Derka

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