"Nostalgie"
MON PAYSAGE ETRETAT
"Tranquillité"
"En pensant à Étretat
Je ne viens pas souvent... trop touristique et moi, j’aime me promener dans la nature, sans personne autour de moi. Là, j’ai l’impression de piétiner derrière les autres. En général, je viens faire découvrir le site, je vais dans le bourg et surtout sur l’Aiguille creuse. C’est un lieu emblématique : Arsène Lupin, le cinéma… les gens ont envie de découvrir, c’est comme le Mont Saint Michel.
Et pourtant, cet accès que nous avons pris est très calme, paisible. Ça ne correspond pas du tout à ma vision d’Étretat. C’est caché. J’ai l’impression d’être privilégiée de prendre cette route, sans presque personne. Et il y a une ambivalence entre l’envie de la partager et l’envie d’être tranquille.
C’est aussi l’accès aux Jardins d’Étretat. D’ailleurs, la végétation de la route nous met dans cette ambiance verte. Des Jardins, j’ai un souvenir labyrinthique, tranquille et paisible. Je parle beaucoup de vert et pourtant, Étretat, ce n’est pas vraiment la nature, il y a du monde et c’est davantage la mer. En fait, dès que l’on sort des sentiers battus, on découvre de la nature, mais une nature domptée : la route, le jardin, le calvaire, la petite église, les statues...
Puis en haut
Il y a d’abord la chapelle, c’est elle que l’on voit en premier. Ça me fait penser aux morts, c’est quelque chose de nostalgique. Et puis immédiatement, l’Aiguille attire le regard. Toute l’attention se consacre ici et on ne fait pas attention au reste : le monument Nungesser et Coli, le musée, les champs… Je pense que si je n’étais pas allée aux Jardins, je ne serais jamais allée jusque là-bas.
Les petites roulottes sont très touristiques, elles font boites à souvenirs. C’est un peu ridicule et à la fois, on est souvent les premiers à dépenser pour les souvenirs lorsque l’on part en vacances. Ça se marie bien le côté naturel et les endroits où il y a la main de l’homme et notamment les Jardins, je trouve que ça s’interpénètre bien.
Dans mon tableau...
J’ai envie d’un paysage que je ne connais pas. Avec la plaine, l’herbe, on sent la nature ; on pourrait s’enfoncer dans le paysage, l’escalader. Parfois, au musée, on s’imagine dans un tableau, y rentrer, s’y balader. La présence du cadre crée une limite et en même temps quelque chose de très pictural. On se focalise, on est plus attentif aux détails. Il y a cette falaise, de la craie, du silex, j’imagine qu’il y a de l’érosion, on a l’impression qu’elle s’effondre : on voit de la terre, il y a des creux, des arrondis. Ce qui au premier abord parait assez monochrome est finalement varié : la craie, le silex, la terre, l’herbe, la mer en arrière-plan, comme si le peintre l'avait ajoutée pour parfaire le tableau. Il y a ce bleu foncé pour la mer, plus clair pour le ciel et blanc pour les nuages et il y a le vert du premier plan, des plantes, des céréales, peut-être du blé. Si c’était un tableau, on se dirait que le peintre est un génie parce qu’il aurait réussi à représenter chaque brin sur la toile.
Dans mon tableau, la place de l’eau est importante visuellement, mais ce n’est pas l'élément principal, elle semble loin et pourtant je la ressens fortement. Si je suis triste, je vais au bord de l’eau et ça me calme.
Et puis, il y a ce vent marin, rafraîchissant, on entend quelques personnes, mais c’est discret, pas perturbateur, les goélands dont le cri lutte contre le vent. C’est surtout le toucher, l’ouïe, la vue qui sont impactés par ce paysage.
Je vois une certaine fragilité à ce paysage, pas au premier regard. En fait, c'est surtout que je le sais. Le paysage semble pérenne, il bouge peu à priori, en tous cas tellement moins vite qu’un être humain. Il y a une intangibilité. À notre échelle, c’est immuable. En revanche, en fonction des saisons, le paysage change.
Il me fait penser à la période romantique, un personnage sur un rocher face à une mer déchaînée. Je pense à la lutte contre les éléments, mais aussi à la tranquillité située davantage à l’intérieur de la falaise, nichée sous la végétation, dans les recoins, les interstices. Elle se voit à la présence des animaux. L’endroit paraît préservé. Bien sûr, l’homme est passé, on voit le chemin quand on sort du cadre, mais on est vraiment tranquille ici.
La mer se noie dans le ciel, c'est comme si les deux étaient intimement liés, comme s'il ne pouvait y avoir l'un sans l'autre. On a des couleurs très différentes tout au long de l’horizon qui parfois délimitent nettement, parfois sont floues. Il y a une multitude de bleus selon l'endroit où l'on regarde. A priori, on se dit la mer est bleue, mais c’est tellement plus que ça."
Anouk, Étretat
le 11 juin