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"Le bout de jardin qui reste, est essentiel pour moi ; il me rappelle mon père."

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C’est la fenêtre de mon bureau.

Ici, il y a toutes les époques : le passé avec la propriété Lange, une maison de maître en pierres et silex que l’on voit au fond, le présent que symbolise la maison de mes parents, construite dans les années 80 et dans laquelle je vis en ce moment, et le futur avec la mairie et son architecture de béton, assez avant-gardiste… Trois architectures différentes, trois histoires différentes. Et puis je vois, en arrière-plan, la forêt, sur les hauteurs de la route de Saint Jean de Folleville, je vois les saisons passer.

 

Je vis ici depuis septembre dernier… Je suis redevenue Lillebonnaise. J’ai passé toute mon enfance à 300 mètres d’ici, dans l’ancienne maison de mes parents. Ils avaient une propriété sur un vaste terrain d’un hectare. Cette maison appartenait auparavant aux établissements Cornu, magasin de vins et spiritueux, bien connu des Lillebonnais. Elle longeait la rue Desgenetais, la salle Thiers était à l’époque un dépôt de cet établissement.

Lorsqu’ils ont acheté la maison, ma mère me disait qu’il y a eu deux journées entières de vente de matériel : barriques, lits à baldaquin… Elle a regretté de n’avoir rien conservé de cette époque…

A l’époque, le jardin était planté de dizaines d’arbres fruitiers, des pommiers notamment, mon père brassait, il faisait du cidre à la barrique.

 

Puis, des années plus tard, mes parents ont construit leur maison actuelle, au fond de la propriété. La première maison a été démolie et c’est la mairie qui a été construite à la place. Moi, le bâtiment ne me gêne pas, je suis habituée aux architectures modernes, j’ai longtemps vécu dans des villes reconstruites : Saint Nazaire, Yvetot…

 

En revanche, le bout de jardin qui reste, est essentiel pour moi ; il me rappelle mon père pour qui il était très important. Je me souviens de lui y travaillant entre ses trois quarts à la raffinerie. Il l’avait pensé pour y faire venir les oiseaux, il y a des essences très différentes ce qui nous permet de voir des hirondelles, des rouges-gorges… Et il y a ce refuge du sapin en cône dans lequel les oiseaux viennent souvent nicher, comme pour se protéger.

 

Lorsque je suis dans mon bureau, j’ai cette vue. C’est ma pièce de loisirs, il contient de nombreux livres. J’y apporte sur un plateau mon thé ou mon cappuccino. Je me mets au fauteuil et je me cale au ras de la fenêtre. Je vois surtout le jardin, le potager de mon père et la mairie, finalement mon regard ne s’attarde pas sur le parking. C’est aussi dans cette pièce que j’écris, que je fais des recherches historiques. Souvent j’y écoute de la musique, Dvorak ou Beethoven. J’aime particulièrement l’Ode à la joie qui est aussi l’hymne européen. Je suis une fille de l’Europe, j’ai vécu l’Europe, j’ai envie de ça. En tant que Lillebonnaise, j’ai eu la chance de faire des échanges avec Immenstadt en Bavière et Wellington en Angleterre. Tous les ans, à Pâques, on partait et on recevait des Allemands.

 

Cet été, je pense investir le balcon, y installer une petite table, une ou deux chaises. Je me sens bien dans cette maison ; c’est surtout cette vue ; le plus souvent, les rideaux sont ouverts, je vois le jardin que mon père adorait tant. Il y a d’anciens volets en bois ; tous les soirs, je les ferme et les réouvre le matin. J’ai l’impression d’ouvrir la maison et le soir de refermer l’endroit où je vis.

 

Nathalie, le 3 février à 14h00 – rue Auguste Desgenetais.

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